L'Afrique de l'ouest est la sous région qui regorge beaucoup plus de mines dans son sous-sol sur le continent. Et parmi ces pays, le Burkina Faso est en place. 4ème producteur d'or sur le continent. En 2013, près de 200 milliards de Fcfa ont été bénéficiés dans l'exploitation aurifère selon les chiffres officiels. Comment ces fonds sont-ils gérés? La question mérite d'être posée puisque les populations qui cèdent leurs terres pour faciliter cette exploitation vivent toujours dans une situation sociale dérisoire. Nous vous faisons lire cet article pour voir les tractations en cours pour le vote d'un Code minier plus juste au Burkina-Faso. Nous ne cesserons jamais de le répéter. L'or doit briller pour tout le monde au Burkina. Lisez plutôt et suivez-nous dans cette campagne.
Mission conjointe MATDS/MME sur les sites miniers : au-delà de la sensibilisation, un diagnostic de la situation
mercredi 18 mars 2015Sensibiliser
et informer les populations d’une part, et, d’autre part rassurer les
investisseurs, c’est l’objectif principal de la mission conjointe du
ministère de l’administration territoriale, de la décentralisation et de
la sécurité (MATDS) et du ministère des mines et de l’Energie (MME).
Cette sortie qui s’est déroulée du 11 au 15 mars 2015 avait pour
destinations, les régions du Centre-nord, du Sahel et du Nord à travers
les sites de Taparko, Tambao, Essakane SA, Inata, True Gold. Au-delà de
la sensibilisation, ce périple fut un véritable moment de diagnostic de
la situation sur les sites miniers.

900
autorisations et titres miniers valides, sept mines d’or en production,
une mine de zinc (Perkoa) et de grands projets de recherche minière à
un stade avancé à Kiaba, Bomboré, Houndé, Batié et Gaoua. C’est la carte
des ressources minières du Burkina en 2014. Et selon les statistiques
du Fonds monétaire international (FMI) en 2009, l’or est devenu le
premier produit d’exportation en lieu et place du coton. Toujours selon
des données, l’or a rapporté en 2014, environ 193 milliards de FCFA sous
forme de recettes au budget national et contribue à 12% à la formation
du PIB (produit intérieur brut).
Mais, depuis l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre dernier, le
pays enregistre des manifestations violentes sur des sites miniers, se
traduisant par des saccages et incendies des installations. Ce qui met à
mal le bon déroulement des activités desdites sociétés envers
lesquelles, l’Etat a aussi pris des engagements parmi lesquels la
sécurité des personnes et des Biens. « Il s’est installé un peu partout
un certain sentiment de vengeance, de vandalisme auquel n’échappe pas
notre province qui enregistre un site d’exploitation minier et des
exploitations artisanales… », a fait remarquer le haut-commissaire de la
province du Soum (région du Sahel), Mohamed Dah, situant l’importance
de cette mission gouvernementale.
C’est fort de ce constat de manifestations « violentes » généralisées
que le gouvernement, à travers ses départements ministériels concernés, à
savoir les ministères de l’administration territoriale, de la
décentralisation et de la sécurité et celui des mines et de l’Energie, a
décidé de prendre à bras-le-corps la situation. En claire, l’Etat veut
« mettre fin à cette façon de manifester à travers casses et incendies
sur les sites ». Pour cela, juge-t-il nécessaire de subordonner cette
étape à l’information et à la sensibilisation des populations. Car,
indique la mission, parmi les manifestants, il y en a qui sont de bonne
foi, qui n’ont pas les informations vraies. D’où la nécessité de cette
mission d’information et de sensibilisation auprès des autorités
coutumières et religieuses, des leaders d’opinion, des organisations de
la société civile intervenant dans le secteur des mines, des populations
bénéficiaires, des personnels en charge de la sécurité des sites
miniers ainsi que des sociétés minières. « Il faut qu’on change de
manière de revendiquer. Dans les incendies et casses, personne ne
gagne », a campé à chaque étape, le conseiller technique du ministre de
l’administration territoriale, de la décentralisation et de la
sécurité, Naba Ouédraogo, chef de la mission. Cette campagne, qui a
conduit successivement sur les sites miniers de Taparko dans le
centre-nord, Tambao, Essakane et Inata dans le Sahel et Namissigma dans
le nord, a permis d’informer, sensibiliser mais également de comprendre
auprès des acteurs, certains ‘’détails’’ qui entourent l’exploitation
minière. Selon Naba Ouédraogo, au-delà des actions de pacification, des
mesures importantes sont envisagées pour que les ressources minières
profitent davantage aux communautés, surtout celles des sites d’accueil,
ne serait-ce qu’à travers la révision du code minier qui augmente la
part contributive des sociétés minières au plan de développement local.
Un véritable déficit de communication entre acteurs
Les
différents sites partagent un certain nombre d’insuffisances. Il s’agit
d’abord du manque de communication entre les parties, faisant ainsi le
nid aux suspicions au détriment des cadres de concertations et de
dialogue. C’est la conclusion à laquelle parvient la mission à chaque
étape, à l’exception d’Essakane où un cadre de concertation
« satisfaisante » existe et bien apprécié par les populations. Une autre
difficulté, corollaire de la première, c’est la « manipulation » perçue
par des parties dans certains mouvements de revendications. Outre
cela, la mission a également relevé sur la plupart des sites, un manque
d’approche d’intégration des sociétés aux populations des sites
abritant leur exploitation. Ces sociétés font fi des valeurs
traditionnelles qui veulent que l’on fasse des pas de courtoisie, ne
serait-ce qu’aux notoriétés locales. C’est pourquoi, pour le chef de
mission, s’agit-il également à travers cette sortie, « d’inviter les
sociétés minières à s’intégrer davantage et ce, au-delà de ce qui est
écrit dans les conventions. Il faut avoir une approche sociale des
populations à la base. On ne peut pas venir dans une localité, se mettre
à exploiter sans un seul ‘’salameck’’ aux personnes ressources ».

Au-delà
de ces aspects, les populations estiment que les problèmes que vivent
les acteurs des mines trouvent leur explication dans des sources
lointaines qui remontent de l’étape des votes des lois à la phase
d’installation des sociétés minières en passant par la signature des
contrats. Elles déplorent dans cette logique, que des lois soient votées
sans être véritablement expliquées aux populations qui sont les
premières destinataires. Pour elles, des canaux existent pour expliquer
des lois qui sont revêtues d’une certaine envergure (les radios
communautaires par exemple). Pour elles, il ne faut pas laisser survenir
les problèmes pour ensuite dire que la loi stipule tel ou autre
comportement. « Il y a donc un conflit entre les lois et les
populations », apprend-on.
Aussi, relèvent-elles un manque de « concertations réelles » entre les
populations, l’administration et les sociétés minières avant
l’installation de ces dernières. C’est l’un des reproches faits par les
populations de Namissigma au sujet de la société True Gold. Toute chose
qui, affirment-elles, rend tout dialogue « quasi-impossible ».
L’exploitation minière…, face à des réalités locales !

L’étape
de Namissigma avec la société True Gold était l’une des plus attendues
au regard des manifestations importantes enregistrées courant janvier
2015. Les pertes avaient été estimées à environ quatre milliards de
francs CFA. Au-delà des insuffisances liées à la communication, au
manque d’information et de cadre de concertations entre populations,
administration et société minière, le site de True Gold semble mettre à
nu une autre dimension. « Le cas de True Gold, loin d’être un problème
de lieu de culte, est devenu, en réalité, un problème de santé publique
pour les populations. Kalsaka Mining sert de cas d’école aux populations
de Namissigma et Ramatoulaye », a introduit Abdramane Barry du conseil
régional des organisations de la société civile du nord. « Nous avions
dit en son temps, explique-t-il, que si jamais la question de la mine
de Kalsaka n’est pas réglée, il serait difficile pour une autre mine de
s’installer dans la région. Nous avons cherché à rencontrer le ministre
en son temps (ministre des mines du gouvernement passé, ndlr) qui a
refusé catégoriquement de nous recevoir, malgré que des gens étaient
venus de la France, etc. pour qu’on puisse le rencontrer. On a tenté en
vain de le rencontrer pour lui exposer la situation. Las, on a écrit ce
qu’on pensait de la situation. Et c’est ce que nous avons écrit qui se
passe exactement aujourd’hui à Namissigma. Les gens oublient que ce qui
se passe ailleurs sert de cas d’école pour les autres populations sur le
point d’abriter des mines. Les populations se rendent sur d’autres
sites pour s’enquérir des expériences. Donc, les populations ne
voudraient pas que ce qui est arrivé ailleurs comme désagrément leur
arrive aussi. Ce qui est arrivé avec la mine de Kalsaka est un abandon
total… ». Tout comme de nombreux participants, M. Barry déplore que les
gouvernements burkinabè aient fait des « réactions » son principe de
fonctionnement au lieu de l’action (l’anticipation) qui aurait minimisé
certaines difficultés sur le terrain. Outre ce type de problème qui se
pose sur le terrain, M. Barry relève : « Par exemple, quand on veut
exploser une mine, il faut déguerpir les gens qui sont autour. C’est
dire que même les malades, vous devez les transporter pour aller en
brousse (s’éloigner du site) contre une somme de 1000 francs CFA par
tête. Imaginez… ! Et, à Namissigma, la mine dit qu’elle va payer les
terres aux populations à 200 000 FCFA l’hectare. Demander à un homme de
vendre sa portion de terre à 200 000 FCFA pour la quitter à jamais
(parce qu’une fois tu quittes, c’est fini), comprenez que ce n’est pas
facile. Donc, il faut vraiment comprendre la population. Parfois, c’est
terrible. Dans la région du nord, vous avez trois à quatre personnes sur
un hectare. Vous devez donc diviser 200 000 FCFA par autant de
personnes sur la superficie ». Le cas de la mine de Namissigma mérite,
selon lui, d’être traité avec plus de « profondeur ». Pour cela, dit-il,
il faut que les parties (populations et société minière) s’asseyent
pour chercher une porte de sortie. « Or aujourd’hui, il n’y a aucun
dialogue entre la mine et les populations. Seul l’Etat peut travailler à
ce rapprochement entre les parties pour les amener à s’asseoir pour
discuter. L’Etat (le gouverneur, le haut-commissaire, les ministères de
l’administration territoriale des mines…) est donc le seul
interlocuteur crédible aux yeux des populations, capables de concilier
les positions. (…). Lorsque l’Etat passe par des personnes
intermédiaires, ça ne peut pas marcher », a relevé Abdramane Barry,
mentionnant le rôle capital d’une telle approche du gouvernement dans la
recherche des solutions pérennes.
Cette mission d’information et de sensibilisation était composée, en
plus du chef de mission, Naba Ouédraogo, du directeur des mines,
Emmanuel Yaméogo ; du directeur général de l’ONASSIM (Office national de
sécurisation des sites miniers), François Etienne Ouédraogo ainsi que
des représentants de la police et de la gendarmerie. Le directeur des
mines, en plus des explications sur les différentes étapes qui jalonnent
l’exploration, l’installation des sociétés minières et l’exploitation
des mines, a également annoncé les efforts en cours à travers entre
autres, la relecture du code minier qui permettra aux populations de
tirer mieux profit des retombées des mines. Le directeur général de
l’ONASSIM a, pour sa part, présenté son organisation créée le 31
décembre 2013 et qui a pour objet principal d’assurer la sécurité et de
contribuer à l’amélioration des conditions d’exploitation des sites
miniers.
Oumar L. OUEDRAOGO
Lefaso.net
Encadré :
Des acteurs apprécient …
Mamoudou Ouédraogo, président du Conseil régional de la jeunesse du Nord :

L’initiative
a permis aux acteurs de poser les problèmes qu’ils vivent sur le
terrain à travers les différents sites miniers. Des problèmes dus aussi à
l’absence de ce genre de cadres d’échanges. Ce sont des rencontres à
pérenniser pour permettre aux populations d’être au même niveau
d’informations par rapport aux engagements que l’Etat prend. C’est ce
manque qui entraîne les manifestations sur le terrain. C’est le cas dans
la région du Nord avec la société True Gold. Nous sortons de ces
échanges, très édifiés et nous partagerons les informations reçues avec
les autres jeunes.
La question prioritaire au niveau de la jeunesse, c’est l’employabilité.
Les mines qui s’installent prévoient, en tout cas dans leur texte,
d’employer le maximum de jeunes dans leur zone d’intervention. Mais nous
nous rendons compte qu’au fur et à mesure que les choses avancent, ce
n’est pas le cas. A la limite, ce sont les tâches de moindre importance
qui sont réservées aux jeunes. A l’installation de True Gold en son
temps, le plaidoyer avait été fait par notre structure, de former les
jeunes et la société avait pris l’engagement de le faire. Mais jusqu’à
ce jour, rien n’a été fait. Du coup, il y a beaucoup de plaintes et la
société se focalise sur le fait que beaucoup de jeunes ne sont pas
qualifiés. Nous disons qu’il faut que les gens mettent les moyens, aussi
bien les sociétés minières que l’Etat ; que l’Etat forme les jeunes
pour qu’ils aient les compétences et que les sociétés minières aussi
acceptent que les jeunes viennent faire leurs premiers pas parce qu’on
ne naît pas avec l’expérience. Ceux qui ont acquis les expériences ont
fait leurs premiers pas quelque part et il faut qu’elles aussi, elles
acceptent que des jeunes viennent dans leur société faire les premiers
pas.
Les sociétés ne veulent pas prendre le risque et dans ce cas-là, je
pense qu’il va falloir former, passer par le renforcement des capacités
pour minimiser les erreurs. A titre d’exemple, de nombreux jeunes ont le
permis de conduire mais très peu sont recrutés dans la mine.
Il faut créer formellement un cadre de concertation en lien avec les
questions minières, avec un agenda précis, parce que c’est une question
récurrente et le problème se pose dans bien de localités. Au niveau
local, organiser les structures autour d’une structure faîtière qui va
être l’interface entre les populations abritant les mines, l’Etat et les
sociétés minières.
Assane Sawadogo, gouverneur de la région du nord :

Cette
rencontre a apporté un éclairage dans l’esprit des populations,
particulièrement, des participants à cette rencontre. Notre région
abrite deux sites miniers très importants. Le site de Ramatoulaye a
connu une situation déplorable et cette rencontre d’information et de
sensibilisation va beaucoup contribuer à apaiser la tension, faire
comprendre aux gens que les sociétés minières sont-là par la volonté de
notre pays. Et pour qu’une société minière s’installe, il faut une
convention entre notre pays et les responsables de la société minière.
S’il y a mécontentement au sujet de l’installation ou de toute activité
liée à la société minière, il y a des voies légales pour poser les
problèmes, de façon pacifique pour que l’on puisse chercher des
solutions. Je voudrais simplement dire que la violence n’est pas la voie
appropriée pour trouver des solutions aux préoccupations qui se posent.
Ce n’est que par le dialogue, la concertation, la communication que
nous pourrons trouver des solutions qui conviennent aux problèmes qui se
posent au niveau des sites miniers. Nous avons organisé une campagne
d’informations des couches sociales de notre région, et cette rencontre
est donc un plus de ce que nous avons déjà réalisé. Je suis sûr que cela
va contribuer à apaiser la situation sur le terrain, à responsabiliser
davantage les différents acteurs sur leur rôle et leur place dans
l’exploitation des sites miniers au niveau de notre région.
Abdoulaye Ould Cheick, président de l’ADEO (Association des orpailleurs de l’Oudalan) :

Cette
mission est vraiment la bienvenue parce que nous souhaitons vraiment la
paix et la stabilité dans notre pays. En tant qu’organisation
d’orpailleurs, nous privilégions dans ce sens, les voies de
revendications pacifiques. Nous n’avons aucune doléance à adresser à la
mine, sauf que nous sommes des orpailleurs et on a occupé nos espaces.
Nous ne savons plus comment évoluer. C’est dans ce sens que nous avons
demandé à la mine qui nous a répondus favorablement. Notre seule
doléance, c’est de trouver un lieu propice pour tous les orpailleurs.
Sylvain Collard, Surintendant Maintenance, Essakane :

Nous
avons travaillé pendant des années pour mériter cette confiance des
populations. Et ce, à travers le dialogue. Nous avons mis en place un
processus de communication où nous sommes très à l’écoute des
populations. Cela nous permet, à travers l’équipe que nous avons mise en
place, de nous déplacer sur le terrain dès qu’il y a des doléances. La
haute direction est très à l’écoute des uns et des autres et il n’y a
pas de souci dans nos opérations minières.
Hamadou Maïga, représentant des jeunes de Essakane

Cette
mission vient consolider encore la cohésion et l’entente entre les
populations de Essakane, Falangoutou et la société minière. Il y aura
toujours le dialogue entre les communautés et la mine. Les jeunes sont
en concertation permanente avec la mine qui a pu faire quelque chose
pour nous. Des projets ont été également soumis et nous comptons
vraiment sur la mine. Dès demain même (13 mars, ndlr), cinquante jeunes
seront amenés par la mine pour la formation au permis de conduire et
nous leur disons merci.
Ousmane Pédiaga, jeune de la province du Soum

La
délégation est venue nous apporter des éclaircissements sur les
procédures qui entourent l’installation des mines, les règlements qui
encadrent les revendications et les dispositifs mis en place pour
assurer la sécurité des personnes et des Biens sur les sites miniers.
Nous avons profité pour demander à la délégation que ce genre de
rencontres puisse se multiplier ; il ne pas attendre que survienne un
problème avant d’agir. Il revient à l’Etat de mettre à la disposition
des populations, le contenu du cahier de charge. Les manifestations des
populations sont dues aussi au fait qu’elles ne connaissent pas le
cahier de charge. Donc, elles ne savent pas ce qu’il convient de
demander ou de ne pas demander ; souvent elles demandent plus qu’il n’en
faut ou ce qu’il ne faut même pas demander. Nous avons également lancé
un appel aux populations de s’organiser en associations ou en pôles
d’intérêt pour pouvoir entreprendre des projets de développement et
faire des propositions pour les soumettre non seulement à l’Etat mais
aussi à la mine. L’Etat ou la mine ne peut pas agir envers chaque
individu. Souvent, ils ont la volonté de nous aider mais il n’y a pas
d’organisation sur le terrain et nous n’exprimons pas souvent nos
besoins dans un cadre légal ; ce qui fait que c’est un peu compliquer.
(Source: LeFaso.net)
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