• Maximiser les recettes de l’Etat
• Développer les localités
• Préserver l’environnement
L’or est actuellement le premier produit d’exportation au Burkina. Les populations des zones abritant ces mines y accordent une attention particulière en termes de retombées au niveau local et le secteur suscite de plus en plus de débats.
En 2014, les recettes minières pour l’Etat étaient de 168 milliards 483 millions de Francs CFA (Conseil des ministres du 1er avril 2015 ndlr). Malgré cet apport de l’exploitation minière à l’économie nationale, beaucoup de questions gravitent autour de ce secteur. L’adoption d’un nouveau Code minier fait d’ailleurs couler beaucoup d’encre. Et le Réseau africain des journalistes pour l’intégrité et la transparence (Rajit) a saisi cette occasion le 5 mai dernier pour ouvrir le débats autour des «Enjeux de l’exploitation minière au Burkina Faso».
Le premier enjeu débattu concerne les réformes du projet du Code minier. Hormis les dispositions relatives aux insuffisances et défis qui ont prévalu à la relecture du Code minier, le projet transmis au Conseil National de Transition (Cnt) contient des réformes en lien avec l’organisation et le suivi de l’activité minière, la sécurisation et la maximisation des recettes de l’Etat.
«Par exemple, la possibilité pour l’Etat de mener directement des activités régies par le Code; une meilleure organisation du sous-secteur des carrières par la création de nouvelles catégories d’autorisation; autorisation d’exploitation artisanale, autorisation d’exploitation semi-mécanisée et autorisation d’exploitation industrielle (articles 84 et suivants); le renforcement des dispositions environnementales ; la majoration du taux de la redevance proportionnelle sur la production excédentaire des mines et l’alignement du taux de l’Is sur le taux de droit commun, soit 27,5%, etc.», a expliqué Ousmane Barbari, économiste au bureau d’études du SG du ministère des Mines et de l’énergie.
Si les enjeux politiques et diplomatiques de la relecture du Code minier ne sont plus à démontrer, les enjeux sociaux de ces réformes permettront, espèrent certains observateurs, de résoudre les préoccupations des populations. En ce sens, concernant l’emploi des nationaux dans les entreprises minières, une disposition a été introduite à l’article 39 relatif à la composition du dossier de demande du permis d’exploitation industrielle.
Il faut rappeler que les mines en exploitation ont permis la création de près de 6.000 emplois directs et 25.000 emplois indirects.
Concernant les achats locaux, des dispositions existent et seront reprises dans la convention minière. Déjà une étude a été menée pour faire l’état des lieux et identifier les difficultés éventuelles afin de dégager des solutions pour améliorer l’existant. Notons que l’encadrement de l’exploitation artisanale est également en cours et des dispositions visant à sanctionner le travail d’enfants mineurs sur les sites sont également prévues.
Toute chose qui va entraîner des retombées pour les collectivités territoriales. En effet, l’article 26 du projet de Code minier prévoit la création d’un Fonds minier de développement local (Fmdl) alimenté conjointement par les entreprises minières en exploitation à hauteur de 0,5% de leurs chiffres d’affaires hors taxes et l’Etat à hauteur de 15% des redevances proportionnelles collectées (les Osc souhaitent 1% du chiffre d’affaires des sociétés minières).
Les ressources collectées au titre de ce fonds seront allouées aux collectivités territoriales pour financer les programmes d’investissements communautaires des bénéficiaires.
Les enjeux sociaux
L’exploitation des mines entraîne un changement qui peut être positif pour les communautés, tout comme il peut être négatif. C’est pourquoi, selon les textes, avant d’autoriser une société minière à exploiter une mine, le Gouvernement hôte exige une étude d’impacts sur les plans de l’environnement et du social, et les mesures d’atténuation des impacts négatifs. Cette étude permet notamment de comprendre et de prévoir des solutions aux problèmes sociaux qui seront liés à l’exploitation de la mine.
Ce qui signifie que les impacts sociaux, qu’ils soient positifs ou négatifs, sont connus à l’avance avant le début de l’exploitation. Les actions d’atténuation des effets/impacts négatifs sont également connues à l’avance. Un plan de gestion de l’impact social est élaboré à cet effet. Ce plan de gestion donne les stratégies qui seront mises en œuvre au cours de la phase d’exploitation et de la phase de la fermeture de la mine. Ce plan permet de contrôler, de rapporter, d’évaluer, de réviser et de répondre de manière proactive au changement.
Les Pgis sont donc susceptibles d’ajustements périodiquement, pour un suivi continu des impacts. Mais elles sont nombreuses les populations abritant des sites miniers à se plaindre de ne pas avoir eu connaissance de ce plan ni même des impacts négatifs de l’exploitation.
«En règle générale, les populations ressentent plus d’impacts négatifs que positifs. Cela est dû en partie au fait que les mines sont des mines à ciel ouvert», explique un représentant des Osc, Jonas Hien.
Et de citer quelques impacts négatifs : pauvreté (perte des terres de cultures, de pâturage), maladies (pollutions, contamination de nappes phréatiques); la déstructuration social entraînant des déplacements de villages, pertes des sites culturels ; la cherté de la vie au village (risque d’appauvrissement); les maladies transmissibles (dépravation).
Risques de pollutions et contaminations
Parmi les inquiétudes que suscitent le boom minier, son impact jugé négatif sur l’environnement est le plus criard. Si cette inquiétude est bien connue pour ce qui concerne la production artisanale de l’or communément appelée orpaillage, ce n’est pas le cas pour la production industrielle qui, même encadrée par des textes au niveau national et international, comporte des lacunes.
Sur le plan national, le Code minier pose comme préalable à tout projet de production minière, une étude ou notice d’impact environnemental et social et le Code de l’environnement en son article 25 dit : «Toute activité qui peut avoir un impact sur l’environnement doit faire l’objet d’une étude d’impact environnemental et social». L’étude d’impact environnemental permet de recenser tous les impacts possibles de l’activité sur l’environnement, de proposer les mesures d’atténuation et des plans de réhabilitation des différents sites après exploitation. Cette étude d’impact social et environnemental est une condition sine qua non pour avoir le permis d’exploitation.
Malheureusement, aucune information ne filtre sur ces fameux rapports. Pire, aucune mesure ni information n’est donnée pour assurer la sécurité du transport des produits chimiques entrant dans le traitement de l’or, le cyanure notamment. L’on se rappelle il y a quelques années, un camion transportant du cyanure pour une mine dans le Nord du pays a échoué dans le barrage de la ville même qui abrite le site, avec les risques de pollution et de contamination de toutes sortes.
NK
La fiscalité minière
Le dilemme des Etats dans la gestion du secteur minier porte sur la maximisation de la part de l’Etat dans le partage de la rente minière tout en préservant l’attractivité du secteur minier.
Il s’agit de deux objectifs quelque peu divergents. D’une part, l’on veut attirer les Investissements directs étrangers (Ide) à travers notamment les incitations fiscales, pour exploiter les ressources, et d’autre part on cherche à capter une grande part de la rente minière. Pour concilier les deux objectifs, il est appliqué une fiscalité spécifique au secteur minier dans la plupart des pays. Celle-ci prend essentiellement deux formes, selon Ousmane Barbari, économiste au bureau d’études du Secrétaire général du ministère des Mines et de l’énergie.
Il s’agit de la fiscalité de droit commun aménagée par des dispositifs d’exonérations suivant les différentes phases de l’activité minière ; et de la fiscalité spécifique qui comporte les redevances fixes et proportionnelles, la taxation additionnelle des superprofits, la participation gratuite de l’Etat au capital des sociétés d’investissement, les droits de préemption sur les infrastructures et équipements, etc.
Avant de procéder à la juxtaposition des taux des principaux impôts appliqués au secteur minier de quelques pays de la sous-région, il convient de préciser que le système de taxation de chaque pays résulte d’arbitrages sur la répartition des risques entre l’État et l’investisseur privé.
Numéro d'édition: 109